Quelques caractéristiques de l'approche psychologique écosystémique

pouvant être utiles à sa compréhension

L’approche est cybernétique et écologique.

Elle s’inspire de

la cybernétique, définie comme la discipline qui étudie les phénomènes ou cause et effet sont mélangés en interaction.

l'écologie, discipline qui étudie les rapports des êtres vivant avec leur environnement. 

 Ainsi nous ne chercherons pas de causalité directe et unique à un problème. Pour certaines approches, par exemple, tout se joue dans l'enfance. Si une homme a des problèmes sexuels avec sa femme, on ira chercher dans les rapports avec sa mère les causes de cette difficulté. Dans l'approche écosystémique, on ne fonctionne pas comme cela. 

Interaction cause-effet et cercles vicieux

La plupart du temps il n'y a pas une cause et un effet, mais une interaction entre cause et effet.  c'est le cas de nombreux conflits conjugaux récurrents: l'un des conjoint se plaint, par exemple que l'autre rentre tard le soir et qu'il (elle) n'a pas envie d'être aimable dans ces conditions. mais ce conjoint en question explique que c'est l'attitude peu aimable de son partenaire qui l'incite à rentrer tard. il en sera de même pour un problème de désir sexuel. On a un cercle vicieux que se met en route.  Quel est le début de ce cercle? on n'en sait rien et il faudra renoncer à le savoir pour l'enrayer et faire, à la place, tourner un cercle vertueux. 

Multiplicité et synergie des causes .

L'échec scolaire est un bon exemple. Tel adolescent ne travaille plus à l'école alors qu'il était bon élève auparavant. Pourquoi? on trouvera l'exigence trop forte des parents, une orientation douteuse, des professeurs débordés par une classe difficile, ou peut-être une déception amoureuse. Aucune de ces causes seule n'aurait pu provoquer le problème, c'est leur synergie qui est en cause, en relation avec la personnalité de l'adolescent. Chacune de ces causes aurait pu provoquer un effet contraire. (par exemple un dépit amoureux peut provoquer, en réaction, un sur-investissement scolaire).

Niveau de cause.

C'est bien connu en écologie: la même substance (les nitrates par exemple) est fertilisante à une certaine dose et polluante à une dose plus forte. D'excellents médicaments peuvent être mortels. Nous trouvons beaucoup de phénomènes de ce genre en psychologie. L'amour et la protection parentales sont une bonne chose pour un petit enfant; mais à trop forte dose, elles peuvent l'étouffer. Le désir sexuel d'un homme pour sa compagne est valorisant pour elle et source de plaisir. S'il la sollicite plusieurs fois par jour sans exception depuis plusieurs années, cela peut devenir insupportable pour elle

L’approche est stratégique

Un problème est posé, des objectifs sont fixés. Il s’agit de construire une stratégie aboutissant à la construction de solutions acceptables et validées par le client.

On utilisera alors toutes les ressources du client, du thérapeute, de l’environnement, pour arriver à la construction d’une solution. Les ressources vont très nettement dépasser le cadre de la psychologie. Il pourra arriver que des emprunts soient fait à l’économie, au droit, ou à d’autres disciplines.

L’objectif fixé est le fil conducteur du processus thérapeutique. Toutes les interventions du thérapeute vont dans son sens et sont validées par le client. En particulier, on ne prendra pas des « chemins de traverses » à savoir des questions à « mettre au travail » qui ne correspondent pas à la demande du client, et au but affirmé de la thérapie.

 

Exemple : la demande d’un couple est la résolution de conflits permanents par rapport à la famille d’un des conjoints. La fin de ces conflits internes marque le but de la thérapie. Il se peut que le thérapeute pointe une question ancienne de rapport d’un des conjoint avec ses parents ; il n’est pas stratégique d’entrainer la personne là dessus. Mais il est néanmoins possible, une fois le problème de départ résolu ou en voie de résolution, d'enchainer sur un autre type de travail.

 

L’approche est constructiviste.

Le couple, la famille, l'entreprise, les institutions humaines, sont en fait des constructions, qui ne correspondent pas à une réalité universelle. La construction se fait à partir de points de départ, et par l’action des protagonistes en rapport avec leurs personnalités et les facteurs environnementaux, qu’ils soient physiques ou humains. La construction est continue et peut subir des chocs, des cassures, des virages, des stagnations. Elle peut être modifiée par l’action des protagonistes. Le rôle du thérapeute est d’accompagner cette construction ou re-construction, à la manière d’un architecte, en aidant à l’expression des besoins, en proposant des pistes de solutions, mais aussi en assistant la construction du chantier.

La problématique de couple ou de famille, ou d'entreprise n’est alors pas considérée comme la détérioration de ce qui serait normal, mais d’un manque de quelque chose qu’il va falloir construire.

Dit autrement : le fonctionnement du couple ne va pas de soi. Le dysfonctionnement n’est donc pas la dégradation d’un fonctionnement normal, mais la non construction d’un fonctionnement satisfaisant.

L’approche est solutionniste.

On s’intéresse aux solutions qui peuvent être proposées à la personne, non à la recherche de causes qui auraient pu provoquer le problème.

C’est une position de principe. On considère que la multiplicité des causes est trop grande et qu’une situation d’un être humain à un moment donné ne peut s’expliquer par un événement du passé. On ne négligera pas pour autant l’histoire des personnes, car elle peut permettre de trouver des scénarii dans lesquels elle se trouve coincée. Cela peut aussi être utile pour le travail sur les représentations. Par ailleurs, il faut tenir compte des croyances par rapport aux causes de son problème, et l’importance qu’il peut leur donner.

Insistons sur sur le risque de trop chercher des causes et fouiller dans le passé du client. cela représente plusieurs risques:

    •  Ce peut être une course sans fin. On n'en finit jamais de rechercher son histoire. 

    •  Il n’est pas sûr que la révélation d’une cause supposée résolve le problème

    •  Il y a risque d’être ficelé par le passé, d'avoir le sentiment que, avec les traumas que l'on a subi, on ne pourra jamais en sortir. 

De même une certaine réserve est faite sur l’utilité de la prise de conscience. Celle-ci peut raviver une douleur qui était cicatrisée. Or c’est bien dans le présent que problème doit se résoudre.

En ce sens, l’approche écosystémique n’est pas psychopathologique. Elle ne tend pas à faire du problème posé par le client une pathologie, ni des personnes, ni des institutions. Elle ne vise pas à définir une norme de « santé » dont la souffrance des clients serait une dégradation. Elle voit plutôt chaque situation comme une adaptation à une configuration éco-systémique plus ou moins heureuse. Si celle-ci est trop mauvaise, elle entrainera de la souffrance, qui motive la consultation du psy. Le but de la thérapie est d’aider à trouver une solution meilleure.

L’approche est praxéologique.

Elle se centre en effet sur la pratique et sur les moyens d’action pour évoluer d’une situation douloureuse à une autre heureuse. Elle n’est donc pas explicative, en ce sens qu’elle ne définit pas une théorie universelle du psychisme, telle que les topiques freudiennes ou les états du moi de l’AT. Mais elle peut utiliser le cas échéant des notions d’autres approches de la psyché humaine. L'approche écosystémique est compatible avec la plupart des théories psychologiques.

On considère que la compréhension des causes, ou raisons d’une difficulté, peut être intéressante dans la mesure où elle débouche sur une amélioration, mais n’est pas un but en soi, ni un critère de succès. Elle n’est pas non plus obligatoire.

La recherche de causes dépend aussi de la représentation du client. Si celui-ci pense que la cause est la condition du changement, alors on l’accompagnera dans cette recherche, jusqu’à ce qu’il trouve une « explication » qui lui convienne.

 

Le modèle PPCT

(Personne Processus Contexte Temps)

Le modèle écosystémique que j'utilise et développe est fortement inspiré du modèle PPCT, développé par Urie Bromfenbrenner dont on trouvera l'exposé dans l'ouvrage suivant: Le modèle écologique dans l'étude du développement de l'enfant, Sous la directions de Réjean Tessier et Georges Tarbulsy, presse universitaire du Québec, Québec 1996

 

Ce modèle de développement de la personne humaine, depuis son enfance, repose sur le principe suivant:

le  développement survient au cours de processus interactifs progressivement plus complexes et réciproques entre un organisme bio-humain et les personnes, objets et symboles présents dans son environnement immédiat.

Une étude a beaucoup influencé ce modèle, portant sur les enfants de faible poids à la naissance, menée entre 1957 et 1964 par Cecyl Mary Drillien, professeure à l'université d'Edimbourg. Celle-ci s'est intéressée aux enfants nés prématurément et de faible poids. Il s'avère - on la savait avant l'expérience - que ces enfants ont dans leur ensemble un handicap qui va se traduire par des problèmes de comportements plus fréquent que la moyenne des enfants. Mais Drillien va noter l'influence de deux facteurs:

  • d'une part la catégorie socio-économique

  • d'autre part les soins maternels apportés aux enfants. 

Sans entrer dans les détails que l'on trouvera dans l'ouvrage, Drillien a montré que le handicap de petit poids de naissance était aggravé par  des conditions socio-économiques défavorables, mais atténué par des soins maternels de bonne qualité, jusqu'à être complètement compensé. En outre l'effet positif des bons soins maternels était plus important pour des enfants de condition économique défavorable. Il y a donc synergie des diverses causes conduisant à un problème. 

Bromfenbrenner a étudié d'autres situations du même type pour développer son modèle. Il note ainsi l'importance dans le développement (processus) d'un enfant (personne) des facteurs environnementaux (contexte) et du temps (évolution). Il remet dont en question l'idée d'une causalité unique à un problème de développement d'un enfant. Surtout, il montre que l'action sur des variables environnementales (soins maternels par exemple) et la durée dans le temps peuvent compenser complètement une cause due à la personne (petit poids). Ces travaux datant des années 1970 - 80 sont précurseurs et, même actuellement, peu connus.

 

 

Le modèle écosystémique.

Les psychologues de l'école californienne de Palo Alto utilisent le modèle systémique, emprunté à la théorie des systèmes. Dans diverses situations, il m'est apparu que cette référence, quoi que très féconde, avait ses limites. En effet, elle considère trop souvent que le système sur lequel on travaille est fermé et figé. C'est pourquoi je préfère, pour ma part, parler de psychologie éco-systémique. Ce concept est utilisé dans diverses disciplines; je l'ai trouvé en particulier chez les auteurs travaillant sur les enfants ayant des difficultés familiales. Jusqu'ici, je n'ai pas trouvé de référence à ce concept en psychothérapie.

Modele systemique

 

Dans cette optique, on considère l'être humain comme un individu agissant en constante interaction avec les systèmes dans lesquels il est immergé, ou a été immergé dans son histoire.

 

Il s'agit dans tous les cas de systèmes ouverts,

c'est à dire eux-mêmes en interaction entre eux dans les divers niveaux. L'expression écosystémique peut s'entendre de deux manière, selon la césure du mot   

Eco-systémique, venant de systémique et de « éco » c’est-à-dire étude d’un système, par exemple couple ou famille, mais rapporté à son environnement, autrement dit d'un système ouvert et non fermé. En prenant ce sens, on retrouve toute la puissance de la psychologie systémique, mais plus ouverte.   

Ecosystém-ique, adjectif lié à écosystème, défini comme l’ensemble des éléments physiques, chimiques, et biologiques vivant en un même lieu. En ce sens on va utiliser tous les apports de l'écologie (au sens scientifique et non politique).  Pour simplifier, on considérera trois niveaux de systèmes :   

Le macro-système constitué, pour nous, de la société française du début de XXIème siècle.   

Les méso-systèmes intermédiaires, par exemple la famille élargie, l'entreprise, le réseau des amis, les diverses associations ou regroupements auxquels l'individu appartient.  

Les micro-systèmes, par exemple le système "couple" ou le système "famille".

On peut aussi ajouter le "méga-système" constitué de l'espèce humaine, et le "giga-système" de l'univers. Ces systèmes peuvent être l'origine des problèmes qui se posent, mais peuvent aussi être générateurs de ressources. L'un des objectifs du travail thérapeutique est de rechercher et d'activer ces ressources.

Quel est l'intérêt de cette approche?

Elle est particulièrement intéressante pour toutes les difficultés psychologiques dont l'origine est extérieure à la personne mais où la personne elle-même est impliquée, en particulier   

•  Les problèmes de couple et de famille   

•  les difficultés psychologiques dans la vie professionnelle

Elle présente les avantages suivants:

Elle est centrée sur le problème précis que pose la personne ou le couple.

Elle est dirigée vers la recherche de solutions plutôt que la recherche de causes.

Elle permet donc d'aller vite, ce qui est nécessaire pour des questions qui sont parfois du domaine de l'urgence.

Cette approche utilise bien entendu tout l'acquis de la systémique, tout en permettant l'intégration d'autres méthodes et théories psychologiques.

Les méthodes cognitives et comportementales sont d'une aide précieuse.

Les thérapies humanistes peuvent être aussi d'un grand secours lorsqu'il est nécessaire de travailler sur l'influence du passé de la personne.

Les références psychanalytiques ont tout leur intérêt, bien que la méthode stratégique soit structurellement différente de la méthodes psychanalytique.

Pour avoir plus de précisions sur le fonctionnement de ce modèle, cliquez